La sauvegarde des agadirs*, monuments de pierre de l’Anti-Atlas marocain
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La sauvegarde des agadirs*, monuments de pierre de l’Anti-Atlas marocain

Malika Fassi Fihri

«Village refuge, grenier citadelle, maison de tribu, forteresse ou magasin collectif». Tous ces termes sont utilisés par la littérature scientifique pour désigner ce qu’on appelle communément les greniers collectifs de l’atlas. Les marocains les appellent «agadir». Agadir est un mot en tachelhit* qui signifie mur. «Mur» parce que le grenier a été conçu comme un édiice défensif, grande bâtisse de pierre cernée d’enclos, il renfermait les biens les plus précieux des tribus berbères, et principalement leurs grains d’orge et de blé. Ce seul terme évoque toutefois une bâtisse qui réunit bien plus de fonctions. Architecture sacrée et collective, l’agadir est une institution. Autrefois, il jouait un rôle socio-économique et culturel puisqu’on y stockait les denrées de la tribu. Il était aussi le siège des élus communautaires ce qui lui conférait une fonction politique, et il renfermait parfois des fonctions religieuses. Pour répondre à ces diverses nécessités, le grenier s’organisait autour d’une réserve massive, un ensemble de cases appartenant aux familles du village. Son entrée, unique et fortifiée, s’accompagnait de dépendances destinées à la collectivité : la loge du portier, les magasins des artisans, l’écurie, la citerne, la salle du conseil et la mosquée.

A la fois bien collectif et propriété individuelle, les greniers nous renseignent sur toute l’organisation socio-spatiale qui s’est mise en place dans la région. C’est aussi cet aspect sociologique de l’étude qui m’a intéressée. L’histoire des tribus berbères a fait de l’Anti-atlas un territoire particulier du Maroc, tant au niveau géographique que d’un point de vue identitaire. Dans le dialecte local, amazigh (équivalent de berbère), a le sens d’ «homme libre». Si les greniers sont un symbole dans la région, c’est parce qu’ils rappellent justement les capacités d’autogestion des sociétés berbères. Plus qu’une condition, c’est un état d’esprit qui leur a permis de préserver leur langue, leurs coutumes, leur tradition constructive, pour aujourd’hui faire partie de la mosaïque culturelle qui compose le Maroc.

Face à un sujet encore peu exploré, ma démarche a d’abord consisté à réunir la littérature scientiique existante dont l’intérêt pour la région de l’Anti-atlas est récent.

J’ai découvert un précieux ouvrage, publié en 1951 par Djinn* Jacques Meunié, une ethnologue qui nous livre une monographie avec plans et photographies détaillés des agadirs.

J’y ai trouvé des typologies de greniers très diversiiées tout en comprenant leurs logiques d’organisation et leurs fonctions. En m’appuyant sur ces relevés, croisés à un «atlas illustré des agadirs de l’Anti-atlas occidental», ouvrage plus récent publié en 2012, j’ai pu effectuer un repérage me permettant de mener une étude de terrain. Les objectifs de cette enquête étaient multiples. Dans un premier temps, il me semblait que l’analyse morphologique des greniers était à compléter par son rapport à son contexte actuel : socio-économique, symbolique, rural et environnemental. Autrement dit, comment le grenier s’intègre et fonctionne dans son village ? Comment le village, lui-même, s’organise ? Comment se caractérise la gestion communautaire ? D’autre part et d’un point de vue purement architectural, les visites me permettaient d’effectuer des relevés du bâti et plus précisément des cases à grain individuelles, et de pratiquer les lieux pour noter mon ressenti sur les ambiances et l’atmosphère forte qui se dégagent de ces monuments. J’ai ainsi visité neuf greniers de tailles différentes, allant de 40 à 295 cases sur un nombre d’étages variant entre 2 et 4, de typologies différentes, avec des greniers ronds, rectilignes ou de forme aléatoire et des greniers ayant connu des extensions; dans des états de conservation allant de la ruine au grenier restauré, et enin dans des environnements différents, à savoir des greniers de village, de plaine, de colline et de piton. Confronter ces différentes caractéristiques m’aura surtout permis de définir les points communs entre les greniers dans le but d’inscrire le projet dans une large échelle.

La tardive institutionnalisation de la culture berbère a finalement eu un impact sur le patrimoine que constituent les greniers collectifs qui se dégradent depuis de nombreuses années et menacent de disparaitre. A l’heure où la majorité des stratégies de développement sont axées sur les grandes villes, la sauvegarde des agadirs soulève la double problématique de la décentralisation et de l’habitat dans le sud marocain marqué par des ruptures identitaires.

L’approche in situ m’aura permis d’interroger la pratique du projet et aussi d’avoir cette réflexion en creux sur l’architecture berbère et le système des villages. J’y ai vu l’opportunité et la nécessité d’explorer de nouveaux territoires encore largement méconnus et qui reflètent la diversité nationale. En effet, la richesse typologique dont regorge le domaine de l’habitat rural au Maroc, représenté par 40% de la population, font de l’Anti-atlas et des greniers, un terrain d’expérimentation idéal.

 
SOURCE WEB PAR ACADEMIA.EDU

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