Des bactéries retrouvées dans le sédiment du Pacifique pourraient avoir plus de 100 millions d'années (Géoparc Jbel Bani)
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Des bactéries retrouvées dans le sédiment du Pacifique pourraient avoir plus de 100 millions d'années (Géoparc Jbel Bani)

Des chercheurs sont parvenus à "réanimer" en laboratoire des bactéries remontées du sédiment du Pacifique sud. Avec un âge estimé à 101,5 millions d'années pour certaines, elles seraient les plus vieux organismes vivants jamais trouvés sur Terre.

Les scientifiques ont réussi à faire revivre des microbes vieux de plus de 100 millions d'années, récupérés dans les sédiments des fonds marins.

Viendrait-on de réveiller d'un bien long sommeil les formes de vie les plus anciennes sur Terre ? Une équipe japonaise de géomicrobiologistes a réanimé en laboratoire des bactéries prélevées dans les profondeurs sédimentaires du Pacifique sud, dont certaines auraient plus de... 100 millions d'années, selon la datation du sédiment duquel elles étaient prisonnières. Un tel âge feraient donc d'elles des contemporaines des dinosaures. Cette prouesse est relatée dans un article de Nature Communications en date du 28 juillet 2020.

Nous savons depuis près de 15 ans que des organismes vivants se cachent sous le plancher océanique, là où les nutriments et l'oxygène se font quasiment absents. Mais jusqu'à présent, nous ignorions si les individus y évoluant, plongés dans une sorte de veille indispensable à leur survie, était capables de sortir indemnes de cet état léthargique. Yuki Morono, de l'Agence japonaise pour les sciences et technologies marines et terrestres, et Steven D'Hondt de l'Université de Rhode Island, aux Etats-Unis, ont décidé d'aller vérifier par eux-mêmes. Au cours d'une expédition de forage organisée dans le gyre du Pacifique sud, une région à forts courants connue pour être l'une des plus pauvres en vie, ils ont extrait des carottes d'argile et d'autres sédiments à des profondeurs allant jusqu'à 5.700 mètres sous le niveau de la mer.

Une "convalescence" de plus de 500 jours

Après avoir obtenu la confirmation que les échantillons prélevés contenaient une faible quantité d'oxygène, signe que les bactéries présentes n'avaient que très peu de matière organique à disposition pour se nourrir, les chercheurs ont rapporté leur petit butin en laboratoire : quelques micro-organismes qui "hibernaient" depuis plus de 100 millions d'années dans une couche de boue, elle-même enfouie à 75 mètres sous le fond de la mer.

Bien sûr, la manipulation pour espérer réanimer de tels êtres vivants fut loin d'être aisée. Il fallut aux chercheurs les "nourrir" jour après jour pour espérer repérer à un moment des signes de vie microbienne dans ces morceaux d'argile. Ont ainsi été régulièrement injectés dans ces échantillons des nutriments mélangés à des isotopes de carbone et d'azote. En dix semaines, ces isotopes ont commencé à apparaître à l'intérieur des microbes, indiquant que ces derniers avaient commencé à s'alimenter comme n'importe quelles bactéries classiques. Progressivement, les microbes se sont développés, se sont multipliés et se sont adonnés à tout un tas d'activités métaboliques. Dans les échantillons de la couche datant 101,5 millions d'années, la plus ancienne, ils ont même fini par atteindre la concentration de plus d'un million de cellules par centimètre cube après 65 jours, contre à peine un millier au départ. Un vrai baby-boom.

Une longévité difficilement concevable

Si ces bactéries sont aujourd'hui fringantes, les chercheurs s'interrogent encore sur la façon dont elles ont pu traverser sans dommage plus de 100 millions d'années. En conditions hostiles, ce type d'organismes prend normalement la forme de spores, plus adaptée à une vie d'inactivité quasi-totale. Ce que n'ont pas fait nos bactéries du sous-sol marin. Les scientifiques supposent donc qu'elles se sont divisées très lentement, million d'années après million d'années. "Maintenir une pleine capacité physiologique pendant 100 millions d'années dans cet état d'isolement est un exploit impressionnant", a déclaré Steven D'Hondt à Science. Selon lui, de nombreux biologistes restent même troublés, voire hermétiques, à cette idée.

En 2000, une équipe avait affirmé avoir ressuscité des microbes piégés à l'intérieur de cristaux de sel vieux de 250 millions d'années. De nombreux chercheurs avaient cependant remis ce record en question, affirmant que les microbes avaient été observés suite à la contamination des échantillons. L'année dernière, d'autres bactéries vivant dans des sédiments vieux de 15 millions d'années avaient à leur tour été découvertes par un chercheur de l'Université de Munich. Celles rapportées à la surface par l'équipe de Yuki Morono repoussent ainsi d'un tout autre ordre de grandeur la longévité de certaines formes de vie. Il s'agit ici, en l'occurrence, de plusieurs temps géologiques successifs.

Sans doute plus important encore, ces bactéries sont la preuve que de très faibles quantités de nourriture et d'énergie ne semblent pas constituer un obstacle au maintien de la vie sur Terre. De quoi supposer qu'il en est peut-être de même ailleurs dans notre système solaire et dans l'Univers.

Le 30.07.2020

Source web par : sciences et avenir

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