L'IA aide à percer les secrets de l'hydrogène métallique au cœur des planètes géantes (Géoparc Jbel Bani)
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L'IA aide à percer les secrets de l'hydrogène métallique au cœur des planètes géantes (Géoparc Jbel Bani)

L'hydrogène isolant devient un solide métallique conducteur à très haute pression. Cette transition de phase étonnante a été observée mais elle reste mal comprise alors qu'elle pourrait révolutionner la technologie et aider à comprendre ce qui se passe au cœur des planètes géantes largement composées d'hydrogène. L'IA aide aujourd'hui à simuler sur ordinateur le comportement de l'hydrogène métallique pour percer ses secrets.

Un nouvel épisode de la saga de la quête de l'hydrogène métallique vient d'être publié avec un article dans le journal Nature par une équipe internationale de chercheurs de l'université de Cambridge, d'IBM Research et de l'EPFL. Cette fois-ci, il ne s’agit pas d’expériences à haute pression avec des enclumes de diamants, comme celles dont Futura avait parlé et réalisées par une équipe de physiciens français du CEA et du Synchrotron Soleil. Non, il s'agit de l'utilisation de l'intelligence artificielle (IA) via le fameux deep learning (voir à ce sujet le livre, libre en ligne, du regretté David MacKay), l'apprentissage profond avec des réseaux de neurones, révolutionné il y a quelques années par le Français Yann LeCun ainsi que les Canadiens Yoshua Bengio et Geoffrey Hinton, qui se sont vu décerner le 27 mars 2019 le prix Turing 2018, l'équivalent du Nobel en informatique, par l'Association for Computing Machinery (ACM).

Le deep learning a permis de réduire le temps de calcul ordinairement pris sur des superordinateurs par de savantes simulations numériques, combinant les lois de la mécanique quantique et de la mécanique statistique, pour explorer les développements d'une découverte théorique faite, en 1935, par le prix Nobel de physique d'origine hongroise Eugene Wigner avec son collègue le physicien états-unien Hillard Bell Huntington. La toute jeune théorie de la liaison chimique les avait conduits à comprendre que les liaisons covalentes des atomes dans des molécules d'hydrogène H2 finissaient par laisser la place à des liaisons métalliques si l'on comprimait suffisamment ces molécules. On s'est aperçu par la suite que de l'hydrogène métallique pouvait avoir de remarquables propriétés supraconductrices, et que le cœur des planètes gazeuses géantes du Système solaire devait très probablement en contenir.

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Une vue d'artiste des expériences sur le cœur de Jupiter avec une enclume de diamants. © Mohamed Zaghoo, Harvard SEAS

Une transition de phase problématique

Si l'hydrogène métallique est bien supraconducteur et surtout qu'il le reste à pression ambiante en étant métastable une fois produit à environ un million d'atmosphères, ses applications technologiques seraient nombreuses, facilitant les IRM et évitant des gaspillages d'énergie en conduisant le courant sur des milliers de kilomètres sans résistance, par exemple. Donc, tous les progrès dans ce domaine de recherche ne feraient pas que donner des clés pour comprendre l'origine des champs magnétiques de géantes comme Jupiter, Saturne et leurs cousines dans le domaine des exoplanètes.

Les physiciens font savoir aujourd'hui que d'après les calculs rendus possibles par l'IA, la transition de phase menant à l'hydrogène métallique supraconducteur ne serait pas du premier ordre dans leur jargon. Il s'agit d'une référence à des travaux initiaux du brillant physicien Paul Ehrenfest, dont la vie s'est tragiquement terminée. Au début du XXe siècle, il avait en effet esquissé une classification des transitions de phase en deux catégories. La première concernant, par exemple, le passage de la glace à l'eau liquide et la seconde le passage d'un matériau ferromagnétique de l'état aimanté à la cessation de cet état. Une classification moderne un peu différente de celle d'Ehrenfest existe et a repris ses termes, à savoir transitions du premier et du second ordre.

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Paul Ehrenfest (1880-1933) était un physicien théoricien autrichien. © DP

Un point critique caché, révélé par l'IA

« L'existence de l'hydrogène métallique a été théorisée il y a un siècle, mais ce que nous ne savons pas, c'est comment ce processus se produit, en raison des difficultés à recréer les conditions de pression extrême de l'intérieur d'une planète géante dans un laboratoire, et de l'énorme complexité de la prédiction du comportement des grands systèmes avec des atomes hydrogène », explique le principal auteur de l'article de Nature, le physicien Bingqing Cheng du laboratoire Cavendish de Cambridge.

On peut se faire une idée de la difficulté théorique des calculs lorsque l'on sait que la modélisation à l'aide de l'équation de Schrödinger - l'équation fondamentale de la mécanique quantique du comportement de seulement quelques milliers d'atomes pendant quelques nanosecondes dans le cadre des conditions régnantes au cœur de Jupiter, et qu'il est difficile de reproduire en laboratoire - dépasse la capacité des supercalculateurs les plus grands et les plus rapides du monde.

Les calculs rendus possibles laissent aujourd'hui penser que la transition de phase entre l'hydrogène moléculaire et l'hydrogène atomique métallique n'est pas du premier ordre, avec une discontinuité, mais peut se faire continûment à l'aide d'un point critique caché jusqu'ici. Ce point est l'analogue du point critique bien connu en thermodynamique. Aux températures et pressions supérieures à celles du point critique pour un fluide, on ne peut plus distinguer une phase liquide d'une phase gaz, et on passe continûment des propriétés d'un liquide (à haute pression et relativement basse température) à celles d'un gaz (à relativement basse pression et haute température). On est alors en présence de ce que l'on appelle un fluide supercritique.

Sur cette vidéo, l'expérience commence par une simple évaporation de CO2 liquide avec une diminution progressive de la hauteur de la ligne de séparation entre forme liquide et gazeuse en équilibre pour le CO2. La vidéo se poursuit en montrant différents passages du gaz carbonique à l'état supercritique avec retour à l'état liquide. On observe alors que ce passage se constate lorsque la ligne de séparation entre les deux états disparaît. Lorsqu'un fluide est supercritique, il se trouve dans un état intermédiaire entre un liquide et un gaz, sans différences nettes. © Flachzange1337

Le 09/09/2020

Source web par : futura-sciences

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