Plongée à l'intérieur d'une naine blanche, une première !
Le satellite Kepler permet de découvrir des exoplanètes mais également de sonder l'intérieur des étoiles. Une équipe internationale s'en est servie pour révéler le cœur d'une naine blanche. Surprise : celui-ci ne correspond pas exactement aux prévisions des astrophysiciens...
Les années 1950 et 1960 ont vu les progrès fulgurants de l'astrophysique nucléaire emboîter le pas aux travaux des pionniers de la structure stellaire des années 1920 à 1930, tels Arthur Eddington et Subrahmanyan Chandrasekhar. Ces progrès ont notamment été marqués par les travaux de chercheurs comme Fred Hoyle, Edwin Salpeter et les Burbidge. Grâce à eux, et conjointement avec la montée en puissance des ordinateurs et l'afflux grandissant des données sur les populations d'étoiles, une théorie de l'évolution stellaire a pu être bâtie.
Mais comment être vraiment sûr de ce que contiennent les étoiles ? Comment savoir quels est les mécanismes qui les font évoluer ? En jouant (notamment) au même jeu que celui des géophysiciens sur Terre, c'est-à-dire en développant l'analogue de la sismologie : l'astérosismologie.
En effet, les étoiles peuvent vibrer et être parcourues d'ondes. Les spectres de ces ondes reflètent la structure et la composition des étoiles, tout comme le son d'un instrument de musique nous renseigne sur ce qu'il est. Ces ondes font vibrer la surface des étoiles en modifiant leur luminosité et il est donc possible, grâce à des instruments comme ceux du satellite Kepler (qui dressent une courbe des variations de l'intensité de la lumière des astres), d'écouter en quelque sorte indirectement la musique des étoiles.
Jean-Pierre Luminet nous parle de l'héliosismologie. © Jean-Pierre Luminet, YouTube
Le cœur des naines blanches est difficile à cartographier
Les modèles de l'intérieur du Soleil ont été validés de cette façon : en faisant de l'héliosismologie. L'intérieur d'autres étoiles de type solaire a également pu être sondé, ainsi que celui des géantes rouges, grâce aux observations de Kepler et de Corot.
Quant à l'intérieur des naines blanches, il n'est pas aussi facile à cartographier. C'est pourtant ce qu'a réussi à faire une équipe internationale d'astrophysiciens menée par une jeune chercheuse de l'Institut de recherche en astrophysique et planétologie (Irap, CNRS et UPS), qui va publier bientôt dans Nature les résultats de ses travaux d'astérosismologie concernant la naine blanche KIC 08626021.
Les tremblements d’une étoile génèrent des vibrations se propageant parfois jusqu’au cœur de l’astre, comme ici pour la naine blanche KIC 08626021. Les modes de vibration (à droite) sont le reflet de la structure interne des étoiles (voir aussi la vidéo de Jean-Pierre Luminet ci-dessus). © Stéphane Charpinet, Insu
Des strates d'éléments chimiques qui retracent l'histoire de l'étoile
L'astrophysique nucléaire et la théorie de la structure stellaire nous disent que, selon leurs masses, des étoiles moins massives d'environ 8 à 10 fois notre Soleil ne deviendront jamais des supernovae et seront le lieu de différentes réactions de fusion thermonucléaire avant de finir leur vie sous forme de naines blanches (ce qui est le destin d'environ 97 % des étoiles).
Les naines blanches les plus légères se contenteront de faire fusionner l'hydrogène et le deutérium pour donner de l'hélium ; celles un peu plus massives feront fusionner l'hélium, ce qui donnera des noyaux de carbone et d'oxygène. Les températures étant décroissantes du cœur de l'étoile vers sa surface et évoluant dans le temps avec la vie de l'astre, des strates de compositions différentes, déterminées par les réactions possibles, se mettront en place dans ces étoiles. Il pourra, par exemple, y avoir un cœur où l'hélium se transforme en carbone entouré d'une coquille où l'hydrogène continue de brûler pour donner de l'hélium.
L'évolution et la structure des étoiles destinées à devenir des naines blanches sont, bien sûr, plus complexes que cette description ne le laisse penser (il y a des phénomènes de transferts radiatifs, de mélanges convectifs et de stratifications). Toutefois, de même que les dépôts et les caractéristiques des couches de sédiments et de roches sur Terre gardent la mémoire de l'histoire de notre Planète, la composition et la structuration précises des naines blanches devraient garder des informations précieuses nous permettant de mieux comprendre la physique et l'histoire des étoiles.
Dans le cas de KIC 08626021, les chercheurs ont découvert que son cœur est nettement plus grand et plus riche en oxygène que les modèles ne le laissaient entendre. Cette information, jointe à l'accès au profil de distribution des principaux éléments chimiques présents, devrait nous aider à rectifier et préciser ces modèles. En particulier, cela permettra d'affiner l'usage qui est fait des naines blanches en tant que chronomètre cosmochimiques pour étudier l'histoire de la Voie lactée.
Publié le 08/01/2018
Source Web: futura-sciences
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