


Le géologue est-il un aventurier, un nomade, un vagabond? Ou bien est-il un jeune cadre dynamique qui intègre la mondialisation dans sa carrière? Dans sa vie professionnelle, l'expatriation sera-t-elle choisie ou subie? Y a-t-il des enseignements à intégrer pour préparer au mieux une carrière à l'international? Je vous propose d'explorer le thème de l'expatriation.
L’expatriation est souvent une question fondamentale dans la vie d’un géologue. Or, plusieurs types d’expatriation sont à distinguer selon le lieu, la durée ou la nature de la mission professionnelle. La réussite d’une expatriation repose avant tout sur des qualités personnelles. Parmi elles, la capacité d’adaptation à un contexte multiculturel (plasticité psychologique, gestion du stress) et la gestion de la famille (le travail du conjoint, l’éducation des enfants, l’éloignement de la famille, etc.) sont des aspects fondamentaux. Il existe donc une multitude d’expériences. Voici quelques repères distinctifs, bien qu’une même personne puisse connaître ces différents « états » comme des étapes.
Souvent, l’expérience de mobilité internationale est vécue comme un besoin biologique et psychologique par l’explorateur. A la recherche de sensations fortes sans cesse renouvelées, les jeunes expatriés valorisent par dessus tout la liberté et l’instant présent. Certains collectionnent les pays visités comme d’autres accumulent les livres dans leur bibliothèque. Boulimiques de plaisirs immédiats, ils aiment la mobilité incessante, les surprises qu’offrent les voyages, l’émerveillement lié à la découverte. Par nature, ces explorateurs aiment prendre des risques… Ça les fait vibrer! Ils s’adaptent facilement, aiment l’incertain et peuvent changer facilement et rapidement de jugement en fonction de différentes alternatives suggérées par la perspective qu’ils ont de la situation.
Pour d’autres, la mobilité internationale est avant tout un investissement professionnel valorisant. Ces jeunes recherchent l’autonomie et la responsabilité de leurs décisions et actions. Ils aiment comprendre, se perfectionner dans leur métier, exprimer leurs connaissances scientifiques et techniques voire managériales. La satisfaction différée et l’avenir meilleur font partie de leur stratégie. Ils appartiennent souvent à une communauté de pairs (« les frenchies ») qui leurs assure une certaine stabilité psychique. Parfois, au bout de quelques années d’expériences internationales, l’objectif lié à la réussite professionnelle devient secondaire au regard d’un retour au pays et à la recherche de ses racines familiales, de son groupe d’appartenance originel.
L’expatriation peut aussi être « dans les gènes ». Dans ce cas, la culture internationale fait souvent partie de l’histoire familiale. Ce transnational ne connait pas le sentiment de déracinement temporaire. Au contraire, il partage plus de points communs avec la communauté des cadres internationaux qu’avec les cadres de son pays d’origine. Ce transnational polyglotte valorise la rencontre humaine, le partage avec d’autres personnes, indépendamment de leur nationalité. Pour lui, l’apprentissage des langues est purement instrumental. Plus rarement, l’expatrié choisit de s’intégrer dans son nouveau pays d’adoption
où il fera totalement sa carrière. Si ce pays est porteur d’une culture et de modes de vie valorisés par l’expatrié, l’aboutissement de ce processus peut être la recherche d’une transformation « totale » via la naturalisation.
Notons enfin qu’une expatriation peut être le berceau d’une véritable crise identitaire. En effet, la vie à l’étranger peut conduire à une fragilisation des relations sociales, à une rupture de l’appartenance identitaire, à un isolement subi plutôt que choisi. L’absence des repères culturels classiques exacerbe le sentiment d’incertitude. Il est vécu sur le mode de l’aversion à l’ambiguïté. Dans ce cas, l’expérience internationale altère la sécurité psychologique. Méfiante et solitaire, la personne doute de ses capacités, a des difficultés à lier des amitiés et a l’impression de perdre son temps. Il est temps d’être rapatrié!
Aussi, devant de tels enjeux humains et professionnels, il me semble impératif que toute formation en géosciences se préoccupe du bien-être des futurs diplômés en intégrant dans le cursus une expérience significative à l’international c’est-à-dire une période continue d’au moins 3 mois à l’étranger, l’objectif étant de passer au minimum un semestre d’immersion. Au-delà de l’accord entre le projet professionnel et les cours ou le stage suivis, cette période
doit être anticipée comme une découverte des autres et de soi. En effet, vivre dans un monde vraiment différent de ses attaches culturelles constitue un défi, une occasion de se mettre en danger, de mieux se connaître, voire de se dépasser. Vivre dans un nouveau milieu culturel, c’est laisser ses certitudes au vestiaire, c’est observer, se mettre à la place de l’autre, se décentrer, en un mot comprendre l’autre et accepter sa différence. Vivre une expérience à l’international est aujourd’hui un enrichissement personnel qui n’a pas d’équivalent dans les autres modules d’un cursus classique.
Hervé LEYRIT, Directeur de la Spécialité Sciences de la Terre et Environnement
Published on 19 avril 2017
Source web par blogs.lasalle-beauvais
Les articles en relation

Recherches archéologiques sur les origines de la ville de Rirha /Gilda
Recherches archéologiques sur les origines de la ville de Rirha /Gilda 1. Intérêt scientifique : Le programme de recherches sur Rirha men&
Savoir plus...
Situation géographique et bases géologiques pour Charles Robert-Charrue
Situation géographique et bases géologiques pour Charles Robert-Charrue Au Nord-ouest du continent africain, l’Anti-Atlas constitue le domaine austral du Royaume du Maroc. Comme le suggère l’image sat
Savoir plus...
4 questions pour comprendre le retard des pluies au Maroc (et commencer à s'inquiéter)
4 questions pour comprendre le retard des pluies au Maroc (et commencer à s'inquiéter) CLIMAT - La pluie se fait prier. Des prières rogatoires sont même prévues ce vendredi dans tout le royaume p
Savoir plus...
La ville de Tata
La ville de Tata Tata est une ancienne oasis. Selon la légende ce sont les Almoravides au XIe siècle qui décidèrent d'implanter une palmeraie à Tata comme celle de Marrakech. Aprés, le su
Savoir plus...
L’huile d’argan, l’élixir marocain
L’huile d’argan, l’élixir marocain Les grands chefs raffolent de l'huile d'argan, tout comme les sociétés de cosmétiques. Mais c’est uniquement au Maroc que pousse l’a
Savoir plus...
Les secrets de longévité de la tortue George dévoilés par son génome
Les secrets de longévité de la tortue George dévoilés par son génome Le génome de la tortue géante emblématique des Galápagos, George le solitaire, a été an
Savoir plus...
Jbel Saghro, paysage lunaire et fief de la tribu nomade légendaire des Ait Atta
Jbel Saghro offre des paysages à couper le souffle. Un endroit idéal pour faire des randonnées et des trekkings sur plusieurs jours. La région aux roches volcaniques de Saghro est notre volet touristique de l
Savoir plus...
L'Océan en danger face à l'exploitation et la pollution humaine
L'Océan en danger face à l'exploitation et la pollution humaine Dans cette vidéo, Isabelle Autissier, la présidente du WWF France répond à nos questions sur la biodiversité mar
Savoir plus...
Zagora ...Sport et Loisir à Draa
Zagora ...Sport et Loisir à Draa Trek et Randonnée dans le désert Découvrirez la magnifique vallée de Draa ses palmeraies les paysages somptueux du désert du sud marocain, au ryt
Savoir plus...
Patrimoine : Le Maroc en état d’alerte
Patrimoine : Le Maroc en état d’alerte Le royaume compte se doter d’un plan pour lutter contre le trafic illicite des biens culturels. Un programme dans ce sens vient d’être lancé en partenariat
Savoir plus...
Taza: les spéléologues marocains s’initient au spéléosecourisme (podcast)
Taza: les spéléologues marocains s’initient au spéléosecourisme (podcast) A Taza, 33 spéléologues marocains affiliés à plusieurs associations de spéléologie
Savoir plus...
Appel à la protection des gravures rupestres de Nâama
Appel à la protection des gravures rupestres de Nâama Découverte en 1847 par une expédition française, la station de Tiout, dans le Sud de la wilaya de Naâma, date de plus de 8 000 ans avant J.
Savoir plus...Les tags en relation
Recherche du site
Recherche avancée / SpécifiqueMode de Vue de TSGJB – AMDGJB
Nomadisme Coutume nomades et sédentarité dans le Jbel Bani sédentarité
Géoparc et Recherche Scientifique
Le coins de l’étudiant



Blog Géoparc Jbel Bani
Dictionnaire scientifique
Plus de 123.000 mots scientifiques
Les publications
Géo parc Jbel Bani

Circuits & excursions touristiques

cartothéques


Photothéques
Publications & éditions

