Achoura: Taroudant vibre au rythme de la Dakka (Géoparc Jbel Bani)
Pour les passionnés de folklore et d'art de fraja (spectacle de rue) à Taroudant, la nuit d’Achoura a un caractère typique et particulier. Hommes et femmes, jeunes et moins jeunes, artisans et commerçants, issus de catégories sociales différentes, se préparent à cette soirée dans un esprit de communion qui confère au moment une ambiance à la fois spirituelle, festive et chaleureuse.
Telle est la nuit du neuf Moharram dite « nuit de Achoura », ou encore « la nuit de la bénédiction » pour certains, que les habitants de Taroudant perpétuent des décennies durant avec une série de rituels dont la cérémonie de « la Dakka Roudania » qui constitue l'un des genres musicaux authentiques de cette ville enracinée dans l'histoire.
Cette date qui a coïncidé, cette année, avec le 19 septembre, a constitué un moment idoine pour les amoureux de Dakka et ses praticiens (dqaiqiyas), de converger à la Maâsra (moulin à huile d'olive) Ait Naâma à l'occasion de la première édition de la « Rencontre du patrimoine ».
L'assistance a été gratifiée d'une soirée de Samaâ animée par l'Association Al-Ichrak qui a puisé dans le registre des chants mystiques et des louanges au prophète Sidna Mohammed outre ds morceaux de Malhoun et de l'art de Griha.
Dans cet endroit où les tentes ont été dressées et le sol couvert de tapis, les foules d'invités se succèdent pour savourer un moment artistique unique qui ne se répète qu'une fois par an, alliant les sentiments de célébration avec ses manifestations de chants, de joie et de spiritualité, les louanges au prophète et la fumée odoriférante qui se dégage de l'encens.
A l'approche de minuit, les dqaiqiyas, artisans qui forment le groupe, dans leur habits traditionnels, progressent vers le centre de la tente pour dessiner un large cercle avec au centre le M'kadem Baba Ali Naâma, véritable maestro depuis des décennies, qui donnent ses ordres, avec une douceur mêlée à un sourire spontané. Il trace, selon des critères spécifiques, une forme géométrique aux membres de son groupe dans une maîtrise parfaite de leurs performances.
Au côté du M'kadem, deux autres membres de la troupe veillent à la maîtrise du rythme et du spectacle basé sur diverses percussions (Tambourins et crotales) dans un rythme précis.
La soirée commence par une première dite «El'aït» (appel) qui consiste en une poésie chantée sur un rythme lent et des percussions sommaires. Emmenés par le chef percussionniste, les membres de la troupe commencent à accélérer progressivement la machine rythmique en prélude à la modification du rythme attendu lors de la troisième et dernière phase de la dakka appelée qfal ou qfal Afûs.
C'est par le geste d'une frappe surajoutée que le Mkaddam annonce le changement du rythme. Si «l'entrée» est réussie c'est l'enchantement total, dans le cas contraire, c'est le honte et l'humiliation.
Cette phase finale requiert en effet une grande attention et perspicacité de la part du groupe. D'ailleurs la réussite d'un spectacle de deqqa en dépend et toute non harmonisation entre les dqaiqiyas implique automatiquement un échec, d'après le Mkaddam Baba Na'ma.
Le spectacle célébrant la nuit d’Achoura se poursuit avec plusieurs autres séquences rythmées jusqu'à e que le Mkaddam, avec virtuosité, décide que le moment est venu pour donner le clap de fin.
Partie intégrante de l'héritage culturel marocain, la Dakka est une tradition musicale qui puise son origine du patrimoine oral. Les spectacles organisés le temps de cette fête religieuse d’Achoura et des manifestations culturelles contribuent aux efforts visant à la mettre en valeur, préserver et pérenniser.
Le 24-09-2018
Source web par : maghress
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