A qui profitent vraiment les revenus du tapis Taznakht (Géoparc Jbel Bani)
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A qui profitent vraiment les revenus du tapis Taznakht (Géoparc Jbel Bani)

Si le tapis de la région de Taznakht fait sa réputation, c’est grâce à sa laine, ses couleurs, mais aussi au nombre de nœuds dont il est travaillé. Il compte, selon les connaisseurs, jusqu’à 480.000 nœuds au m², et peut demander jusqu’à neuf mois de travail (Ph. JM )

Réputé par sa qualité, grâce à ses couleurs et le nombre de ses nœuds, la marque de fabrique de Taznakht, le tapis, demeure une source de revenus pour les foyers. Cependant, le produit profite surtout aux intermédiaires et aux grossistes des grandes villes et le nombre de coopératives se réduit face à une concurrence de plus en plus rude.

Après avoir quitté Talliouine et ses coopératives de safran, produit précieux s’il en est, 84 km plus loin en allant vers Ouarzazate, Taznakht vous accueille les bras ouverts offrant son artisanat le plus précieux: le tapis. De bout en bout, en traversant cette ville encastrée entre le majestueux Haut Atlas et le pré-désertique Anti-Atlas, des panneaux vous convient à visiter des coopératives de production de ce produit, qui fait la notoriété de la région, mais aussi sa richesse.

Nous nous arrêtons pour visiter l’une d’elles, la «Coopérative Siroua», comme l’annonce un panneau fixé à quelques dizaines de mètres de son siège. «Siroua»? Du nom d’une montagne de l’Anti-Atlas, réputée par sa laine de bonne qualité extraite d’une race de moutons élevés dans cette région, et qui sert au tissage des tapis.

A l’intérieur, Saâdia, une tisseuse, est en pleine besogne. De ses mains agiles, elle noue un tapis de couleur jaune. Elle est tellement concentrée sur son motif qu’elle ne remarque même pas notre présence. Difficile d’échanger le moindre mot avec elle, à part «labass», elle ne comprend que la langue amazighe, nous, seulement l’arabe darija.

Mais de toute façon, parler dans cette région de la coopérative, des tapis, du comment ils sont travaillés et sont commercialisés, c’est une affaire d’hommes. C’est Hassan, le gérant de la coopérative qui nous reçoit dans son bureau pour nous en parler. Lui, qui voyage beaucoup pour écouler son produit, parle la darija.

Depuis 1995 qu’il est dans le domaine de l’artisanat, principalement le tapis, mais il n’a créé sa coopérative qu’en 2005, à la faveur de la forte demande de commerçants grossistes de Marrakech, Fès et Rabat…, et de celle de clients touristes de passage qui tombent sous le charme du produit et qui l’achètent.

«J’ai commencé de zéro, 5 ou 6 femmes tout au plus, 260 sont maintenant au service de ma coopérative, sans parler de celles que j’emploie s’il y a des commandes importantes ou urgentes. C’est cette richesse qui fait vivre notre ville», explique-t-il. Ce sont les femmes qui travaillent le tapis, pour la simple raison qu’elles sont plus patientes, plus expertes et plus perfectionnistes. «C’est un travail, si l’on peut dire, de la maison, qui se déroule entre des murs. Nous les hommes, nous sommes à l’extérieur, nous nous occupons du reste, de la commercialisation, de l’achat de la laine, et de nos moutons et chèvres pendant les saisons creuses», ajoute notre interlocuteur.

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Le travail des tapis a aussi ses hautes saisons, pendant les premiers six mois de l’année, correspondant à l’affluence des touristes, qui font de la ville une escale sur leur route vers les déserts de Merzouga et de M’hamid el Ghizlane (Ph. JM)

Le pastoralisme constitue, en effet, l’autre ressource de revenus sur laquelle comptent la plupart des foyers ici, à Taznakht. Le travail des tapis a aussi ses hautes saisons, pendant les premiers six mois de l’année, correspondant à l’affluence des touristes, qui font de la ville une escale sur leur route vers les déserts de Merzouga et de M’hamid el Ghizlane.

Mais, contrairement aux apparences et à ce que se dit, ce ne sont pas ces femmes, ni les coopératives qui profitent le plus de ce travail artisanal, mais bien les intermédiaires et les grands magasins des grandes villes qui dégagent une marge importante de profit. Et tout dépend de la qualité. «Un tapis de bonne qualité de 1,5x2,5m qui demande 2 mois de travail effectué par trois femmes, nous le vendons à 2.500 DH.

Le grossiste de la ville, lui, le revend au moins au prix double», se plaint Hassan. Mais dans le commerce, c’est toujours comme cela, ce sont les marchands aux gros moyens qui mettent du beurre sur leurs épinards.

A 2 km de Taznakht-centre en allant vers Foum Zguid, sur la route de Zagoura, un panneau annonce la «coopérative Tizarzit de tissage des tapis». Même décor que la coopérative Siroua: quelques tapis de coloration différente sont étalés sur le mur d’une enceinte fermée, un grand hangar de 500 m². Dans ce dépôt sont stockés des centaines de tapis de toutes dimensions et couleurs, le visiteur est surpris d’une telle quantité, et aussi par la qualité.

«C’est un stock de quelque 1.200 tapis», précise d’emblée M’jid, l’un des responsables de cette coopérative qui nous reçoit pour la visite. Une fortune? «Ce n’est pas rien, mais cela n’est pas une fortune non plus. Ce que nous avons ici ce sont 10 ans de travail.

Si l’on multiplie cette quantité par une moyenne de 700 DH l’unité, cela donne environ 80 millions (840.000 DH Ndlr). Mais ce sont surtout les grossistes dans les grandes villes qui en profitent…», nuance notre interlocuteur. Un bon tapis dépend, selon lui, du nœud, du mariage des couleurs, et bien entendu de la qualité de la laine dont il est travaillé.

Vitesse et agilité des mains

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En traversant Taznakht, les panneaux annonçant des coopératives de tapis sont légion, mais ce n’est qu’une apparence trompeuse. Rares sont celles qui résistent à la concurrence (Ph. JM)

Créée en 2008, cette coopérative d’une huitaine de tisseuses est passée à 160, dix ans plus tard. Des femmes souvent au revenu précaire, dont une bonne partie sont des divorcées ou des veuves. «Nous donnons la priorité à cette catégorie, qui, sans partenaires dans leur vie, elles sont plus vulnérables», explique M’jid. Nous n’en avons rencontré aucune lors de notre visite, l’atelier est vide de tapisseuses.

Ces dernières sont parties exposer leur produit dans une foire tenue à Rabat, nous informe notre guide. De toute façon, ajoute-t-il, les tisseuses ne sont jamais réunies pour travailler ensemble sur un même lieu. «Nous commandons et elles travaillent séparément chez elles, chacune à l’abri des regards des autres, car, ici, la concurrence est rude, chacune est jalouse de sa technique qu’elle veut garder secrète».

Si le nœud pour la confection d’un tapis ne diffère pas tellement, le temps que dure cette confection ne l’est pas, et la vitesse et l’agilité des mains comptent beaucoup dans ce travail. En traversant Taznakht, les panneaux annonçant des coopératives de ce genre sont légion, mais ce n’est qu’une apparence trompeuse.

Rares parmi elles qui résistent à la concurrence, pas plus d’une quinzaine qui survivent encore, «et seulement 3 ou 4 qui parviennent à tirer leur épingle du jeu. Le tapis de Taznakht n’est plus que l’ombre de lui-même. Sa réputation n’est plus qu’à la télévision», se désole notre interlocuteur.                                                                                      

480.000 noeuds au m2

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La région de Taznakht est abondante en laine de bonne qualité, et cette abondance est mise à profit par les femmes. Elles travaillent le tapis souvent chez elles, sur commande des coopératives ou pour leur propre compte, mais le résultat est le même: le tapis est une source de revenu complémentaire qui s’ajoute aux autres ressources: commerce de dattes, de fruits et légumes, de henné, de safran... C’est d’ailleurs de ces produits naturels que le tapis Taznakht tire ses couleurs et sa notoriété.

Cette coloration s’effectue sur le site-même où la laine de tissage est produite: Siroua. Si le tapis de cette région fait sa réputation, c’est grâce à cette laine, ses couleurs, mais grâce aussi au nombre de nœuds dont il est travaillé: il compte, selon les connaisseurs, jusqu’à 480.000 nœuds au m², et peut demander jusqu’à neuf mois de travail.

Chaque année, c’est en cette période de mai et juin que les Taznakhtis font la promotion de leur tapis, grâce au Festival national des tapis de Taznakht qui se tient à Ouarzazate, événement organisé par le ministère de l’Artisanat et de l’Economie sociale et solidaire et la Chambre de l’artisanat, en partenariat avec la Maison de l’artisan, le Conseil communautaire de Taznakht, la province de Ouarzazate…

Le 18/05/2018

Source web par : l'économiste

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