Un nouveau télescope pour révolutionner l'astronomie amateur
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Un nouveau télescope pour révolutionner l'astronomie amateur

Un nouveau télescope développé par la start-up française Unistellar peut mettre l'univers profond à la portée de tout le monde, et même transformer chaque utilisateur en assistant pour l'astronomie professionnelle. Directeur scientifique de cette entreprise et membre de l'institut Seti, partenaire de cette innovation, l'astrophysicien Franck Marchis nous parle de ce télescope révolutionnaire.

Ce qu'il faut retenir

Développé par la société française Unistellar, l'eVscope est un télescope formant rapidement des images en couleurs de galaxies et nébuleuses qui apparaissent alors à l'œil nu pour un utilisateur regardant dans son oculaire.

L'eVscope reconnaît les objets qu'il observe.

C'est un outil de science citoyenne, qui peut se connecter à l'institut Seti, dans le but de centraliser un grand nombre d'observations effectuées simultanément en différents points de la Planète lors d'évènements transitoires.

Le développement de l'eVscope se poursuit et devrait être accessible commercialement à moins de 1.000 euros d'ici un an.

Malheureusement, plusieurs vocations naissantes d'astronomes amateurs se sont brisées face au mur de la réalité. En effet, on ne peut qu'être charmé par les images somptueuses de nébuleuses et de galaxies publiées dans les magazines d'astronomie ou sur Internet. L'envie de les voir de ses propres yeux ou de les photographier est donc bien compréhensible. Sauf que l'astronome en herbe finit souvent par réaliser que s'il est facile de contempler la surface de la Lune, les lunes de Jupiter ou les anneaux de Saturne, il n'en va pas de même pour explorer les objets du ciel profond. Certes, moins d'un millier d'euros peuvent suffire pour acheter des instrument montrant ces objets mais la déception est parfois au rendez-vous. Les images obtenues sont plutôt floues, peu lumineuses et certainement pas colorées.

L'amateur découvre que du travail et du temps sont nécessaires pour s'offrir de belles observations à l'œil nu. Le pas suivant est la photographie, qui apporte la couleur, grâce au temps de pose, mais l'addition atteint alors quelques milliers d'euros. Il faut multiplier les prises de vue, qui s'étalent sur plusieurs heures, et disposer d'un télescope dont le diamètre du miroir est assez grand pour collecter suffisamment de lumière, au moins 200 mm, et qui soit capable de suivre le mouvement de la voûte céleste. Des filtres colorés ou « antipollution », pour atténuer la dégradation du spectre lumineux en ville, s'imposent souvent et, pour de belles images, mieux vaut déplacer son équipement en campagne loin de l'éclairage urbain. Il faut ensuite se lancer dans le travail du traitement d'images sur ordinateur, une affaire passionnante mais sérieuse. Alors commence le plaisir d'obtenir de superbes images de la nébuleuse planétaire de la Lyre (M57 pour les astronomes amateurs) ou de la galaxie des Chiens de chasse.

L'eVscope, un télescope capable d'identifier galaxies et nébuleuses

Une innovation technologique va peut-être démocratiser encore plus l'accès à l'astronomie, à l'ère des technologies exponentielles chères à Peter Diamandis. Elle vient d'une start-up française, Unistellar, qui développe l'eVscope (Enhanced Vision Telescope). Connecté et offrant une vision amplifiée, il a le potentiel de révolutionner l'astronomie amateur.

Futura a eu l'opportunité d'assister à une démonstration de l'eVscope lors de la manifestation organisée par l'Association française d'astronomie (AFA) sur le Beffroi de Montrouge, le samedi 29 juillet pour la Nuits des Étoiles. Le résultat était bluffant. Même sous un ciel brumeux et dans la pollution lumineuse de la ville, quelques secondes ont suffi pour former une image en couleurs de la nébuleuse planétaire de la Lyre. En dessous de ses capacités dans cet environnement, le télescope offrait une vue déjà impressionnante.

En effet, l'eVscope combine une technologie qui permet d'accumuler les photons d'une faible source lumineuse, par un temps de pose, comme le fait un appareil photo, et une technique de traitement de l'image en temps presque réel. En une poignée de secondes, l'engin crée une image qui nécessiterait un télescope d'au moins un mètre de diamètre, alors que celui de cet essai disposait d'un modeste miroir de 114 mm. L'image obtenue s'observe à travers un oculaire, comme dans un instrument classique. Mieux, le télescope reconnaît les astres observés, qu'il s'agisse d'étoiles ou de galaxies, et il affiche automatiquement les noms et quelques caractéristiques des objets présents dans le champ.

Unistellar a mis en ligne des vidéos réalistes qui permettent de se rendre compte des performances de ce télescope encore à l'état de prototype. La start-up veut continuer à le développer en s'appuyant notamment sur une campagne de financement participatif qui sera lancée en automne 2017. L'eVscope sera proposé à moins de 1.000 euros, avec comme objectif les première livraisons pour mi-2018.

Les ambitions de ses fondateurs dépassent ce cadre. Depuis quelques mois, un nouveau membre a rejoint l'équipe et il est connu des lecteurs de Futura : c'est Franck Marchis, de l'institut Seti. Nous avons donc demandé à l'astrophysicien de nous parler de l'eVscope et pourquoi Unistellar se trouve désormais associée avec Seti.

unistellar

De gauche à droite, trois des membres d'Unistellar : Franck Marchis (directeur scientifique et astronome professionnel à l’institut Seti), Arnaud Malvache (président et directeur technique), Laurent Marfisi (directeur général), avec un prototype de démonstration à Aix-en-Provence en juin 2017. Manque sur cette photo Antonin Borot, l'un des cofondateurs d'Unistellar. © Unistellar

Futura-Sciences : Comment avez-vous été impliqué dans l'aventure Unistellar ?

Franck Marchis : Par hasard. J'étais présent en janvier 2017 au CES de Las Vegas (Consumers Electronics Show), le plus important salon consacré à l'innovation technologique en électronique grand public, où une démonstration de l'eVscope était donnée. J'ai été emballé par les résultats présentés et par le projet à long terme d'Unistellar. J'ai dédié ma carrière à améliorer la qualité des images des télescopes professionnels avec l'optique adaptative, donc il était évident qu'un jour je ferai de même pour les télescopes destinés au public.

Unistellar a mis en ligne une démonstration en vidéo de l'eVscope. La formation des images est-elle aussi rapide que celle que l'on y voit ?

Franck Marchis : Absolument, quelques secondes à quelques dizaines de secondes suffisent pour obtenir une image d'un objet du ciel profond, une nébuleuse planétaire ou une galaxie, en fonction des conditions d'observation. Au bout de quelques minutes, l'instrument atteint son maximum pour la qualité des images. Les couleurs sont réelles, il n'y a pas besoin de travailler sur ordinateur des images prises avec plusieurs filtres et de longues poses imposant un suivi très précis de l'objet sur la voûte céleste.

Que peut-on vraiment voir avec ce télescope ?

Franck Marchis : Un de ses objectifs était qu'il soit capable de former une image d'astres aussi faibles que la planète naine Pluton, et c'est le cas. Bien qu'il soit équipé d'un miroir de 11,4 cm, les images obtenues sont équivalentes à celles d'un instrument d'un mètre de diamètre. Lors d'une démonstration, Leo Tramiel, astronome amateur de la Silicon Valley, m'a dit que pour obtenir une image comparable de la nébuleuse du Voile, que nous avons observée à Oakland (une nébuleuse planétaire située dans un nuage chaud et ionisé dans la constellation du Cygne), il lui fallait un télescope avec un miroir de 1 m. Plus précisément, il est possible d'observer des objets dont la magnitude peut atteindre 15,5. Donc, en théorie, les observateurs pourront voir plusieurs centaines d'objets diffus (nébuleuses et galaxies), des étoiles très faibles comme Proxima du Centaure, ainsi qu'un grand nombre d'astéroïdes.

L'eVscope permet aussi de faire en quelque sorte de la réalité augmentée.

Franck Marchis : Oui, il peut réaliser ce que l'on appelle une Reconnaissance automatique du champ (RAC). En connaissant sa position sur Terre grâce au GPS, il peut déterminer quels sont les objets célestes dans son champ et afficher directement sur l'image les noms et quelques caractéristiques de ces objets, qu'il s'agisse d'étoiles ou de nébuleuses grâce à une base de données. Le télescope peut aussi suivre ces objets en mouvement sur la voûte céleste sans procédure d'alignement compliquée et sans une coûteuse monture équatoriale.

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De haut en bas, la nébuleuse de l'Haltère, la galaxie du Tourbillon et la nébuleuse de l'Aigle, observées avec le télescope d’Unistellar à l’observatoire des Baronnies Provençales, en France. © Unistellar

Quel est votre rôle dans cette aventure ?

Franck Marchis : En tant que chercheur à l'institut Seti et directeur scientifique Unistellar, je dois aider à mettre en place le mode « Campagne d'observation » développé pour cet instrument en partenariat avec l'institut. Les astronomes amateurs utilisant l'eVscope pourront se connecter en direct avec l'institut et lui fournir les données collectées pendant leurs observations. On pourra donc avoir une détection précoce et un suivi des phénomènes transitoires, comme l'apparition de supernovae dans des galaxies ou de nouvelles comètes, grâce au fait que les observateurs sont répartis sur toute la surface de la Terre, ce qui contribuera à s'affranchir des contraintes météorologiques locales et des fuseaux horaires. Les astronomes professionnels pourront donc être avertis plus efficacement de l'apparition des phénomènes à l'observation jusque-là réservée à des instruments puissants.

Les données sur les comètes et les astéroïdes provenant de plusieurs observateurs seront automatiquement combinées, ce qui permettra de former des images de meilleure qualité et de déterminer plus rapidement et plus précisément leurs paramètres orbitaux. Ce qui est bien sûr intéressant pour les géocroiseurs. Il peut aussi être utilisé pour étudier les astéroïdes troyens de Jupiter, les planètes naines de la ceinture de Kuiper, les étoiles variables ou pour rechercher les supernovae dans des galaxies lointaines.

Nous pensons que nous ne sommes qu'au début de l'exploitation du potentiel de l'eVscope. Son prix et sa facilité d'utilisation et de transport le mettent à la portée de particuliers, d'écoles et de clubs d'astronomie, même dans des pays où les télescopes sont rares. L'accès à l'astronomie serait ainsi possible à un plus grand nombre de personnes sur la planète, y compris pour la science citoyenne. Nous voulons aussi permettre un développement collaboratif en ligne d'applications pour notre télescope, par exemple pour observer et suivre l'ISS. Cela pourrait catalyser la création d'une sorte de Facebook de l'astronomie.

Le 17 août 2017                                      

SOURCE WEB Par Futura-Sciences

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