Les premiers animaux étaient peut-être des éponges
Reconstituer l'origine des animaux, et en particulier sous formes multicellulaires, est l'une des clés permettant de déterminer notre origine. Des stéroïdes trouvés dans des roches sédimentaires justes avant le début du Cambrien laissent penser que les premiers métazoaires étaient les éponges, il y a plus de 630 millions d'années.
L'ADN est très fragile de sorte que nous n'avons aucun espoir de pouvoir ressusciter les dinosaures selon un scénario à la Jurassic Park. Toutefois, certaines molécules, comme le collagène, peuvent traverser des dizaines de millions d'années et même, des centaines de millions d'années, nous donnant un aperçu ténu de la biologie des espèces disparues. Cela permet parfois d'avoir des débuts de réponse concernant la structure et l'histoire de la mise en place de l'arbre de la Vie alors que les fossiles retrouvés restent muets directement sur certaines questions.
On aimerait bien mieux comprendre ce qui s'est passé juste avant et pendant l'explosion cambrienne qui a vu brutalement (en tout cas du point de vue des archives géologiques que nous a laissées la Terre) un surgissement d'organismes non seulement multicellulaires mais surtout très diversifiés comme en attestent les fameux schistes de Burgess, au Canada. Ainsi, on aimerait bien déterminer un peu mieux notre arbre généalogique, dont les racines plongent au plus profond de l'histoire de la biosphère, il y a des milliards d'années, au début de l'archéen, probablement.
Une présentation de la découverte des chercheurs du MIT concernant les éponges (voir l’article ci-dessous) il y a quelques années. Pour obtenir une traduction en français assez fidèle, cliquez sur le rectangle avec deux barres horizontales en bas à droite. Les sous-titres en anglais devraient alors apparaître, si ce n’est pas déjà le cas. En cliquant ensuite sur l’écrou à droite du rectangle, vous devriez voir l’expression « Traduire les sous-titres ». Cliquez pour faire apparaître le menu du choix de la langue, choisissez « français », puis cliquez sur « OK » © Massachusetts Institute of Technology (MIT)
Or, il y a quelque temps déjà, une équipe de chercheurs avait fait une trouvaille dans des roches provenant du sultanat d'Oman datées du Cambrien, comme l'expliquait Futura dans le précédent article ci-dessous. Ces roches contenaient une surprenante quantité d'un cousin du cholestérol baptisé 24-isopropyl cholestane, ou 24-ipc. Comme il était su que des éponges modernes produisaient d'importantes quantités du même lipide, les chercheurs en avaient conclu que ces roches contenaient les traces biochimiques laissées par des éponges vivant à cette époque. Mais une certaine ambiguïté existait car des algues pouvaient aussi avoir produit ce fossile moléculaire. Les chercheurs pensaient l'avoir levé mais avec le recul, il n'en était rien. Or, étant donné l'âge des roches, l'on pouvait en conclure que les premiers multicellulaires animaux devaient avoir été des éponges ; cela peut paraître surprenant mais les éponges, comme les coraux, sont bel et bien des formes de vies animales.
Deux fossiles moléculaires pour l’origine des premiers métazoaires
Quant à la conclusion que l'on peut tirer de la présence d'importantes quantités de 24-ipc dans des roches du Cambrien... Heureusement, il semble que le flou régnant ait raisonnablement cessé si l'on en croit un article publié dans Nature Ecology & Evolution par un groupe de spécialistes en géosciences essentiellement états-uniens.
La démosponge moderne Rhabdastrella globostellata fabrique les mêmes stéroïdes que ceux trouvés dans les roches anciennes. © Paco Cárdenas
En effet, ces chercheurs ont continué à traquer des biomarqueurs dans les archives sédimentaires datées bien antérieurement au Cambrien (qui, par convention s'étend de − 541 à − 485 millions d'années environ), non seulement dans les roches d'Oman mais aussi dans celles trouvées en Sibérie et en Inde datées entre 660 et 635 millions d'années.
Cette fois-ci, c'est une autre molécule qui a été trouvée en abondance, à savoir le 26-methyl stigmastane (26-mes), un stéroïde, là aussi. Or, le 26-mes n'est connu que chez les éponges modernes et plus précisément, les démosponges, des métazoaires d'organisation très simple appelés également des silicosponges.
La mise en évidence de 24-ipc et 26-mes dans des sédiments datant d'un peu plus de 630 millions d'années est donc maintenant une indication convaincante que les premiers multicellulaires étaient des métazoaires, en l'occurrence des éponges et donc, des animaux. C'est une découverte d'autant plus intéressante que l'on sait que le génome des éponges de mer possède un nombre important de composantes en commun avec celles intervenant dans le fonctionnement des synapses humaines. Cela laisse penser qu'une partie de l'origine du système nerveux remonte au moins à l'apparition des éponges, il y a plus 600 millions d'années.
Curieusement toutefois, aucun fossile de spicules (des petits bâtonnets calcaires ou siliceux constituant le squelette des éponges) - à défaut de ceux de démosponges entiers - n'a été trouvé dans les roches du Précambrien. Les premières éponges ne devaient donc pas avoir l'aspect de celles que l'on connaît aujourd'hui... ou alors 24-ipc et 26-mes n'étaient pas spécifiques des éponges à cette époque. Mais de quels autres organismes alors ?
Publié Le 17/10/2018
Source web par: futura sciences
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